Il est l’un des maîtres incontestables du théâtre africain. Ambroise Mbia a été à l’honneur aux JTC. Un bouquet de fleurs et de nombreux messages de reconnaissance ont bien rythmé cette rencontre, en attendant le Tanit d’honneur qui lui sera décerné ce soir.
Artiste accompli, avec plus de soixante ans de carrière, Ambroise Mbia est l’une des figures emblématiques du théâtre africain. Il est aussi sa mémoire vivante. Ami de la Tunisie, doyen du théâtre africain, l’artiste accompli Ambroise Mbia continue avec la même passion à créer des œuvres et encadrer les nouvelles générations d’acteurs et de metteurs en scène, porté toujours par l’esprit du partage.
La rencontre qui s’inscrit dans le cadre d’un hommage rendu au théâtre camerounais et précisément de son doyen a été une occasion pour mettre en lumière quelques pages de la carrière de cet ingénieur agronome devenu l’un des grands metteurs en scène africains.
A la salle « Le 4ème art », nombreux sont les artistes tunisiens, camerounais, burkinabés, béninois… qui sont venus écouter le maître et témoigner des précédentes rencontres et collaborations. Tel un baobab, cet arbre majestueux symbole de force, de résistance et de générosité, a été Ambroise Mbia qui n’a pas tardé à rendre hommage à deux compagnons de route, deux amis et frères tunisiens, selon son expression, feu Moncef Souissi que tous les artistes africaines lui doivent la création des Journées théâtrales de Carthage (JTC), cette manifestation phare qui a rapproché les artistes du Continent et feu Ezzedine Gannoun qui dans le cadre du Centre arabo-africain de Formation et de Recherches Théâtrales (hébergé dans le Théâtre El Hamra) a contribué à la formation des centaines d’acteurs et de metteurs en scène de différents pays de l’Afrique.
Donnant le la de cette rencontre-hommage, le directeur de cette 25ème édition des Journées théâtrales de Carthage (JTC), Mounir Argui a dans son intervention célébré un monument du théâtre africain, mettant l’accent sur son talent et également sur ses qualités humaines.
Directrice d’El Hamra, Cyrine Gannoun a partagé avec l’assistance sa joie de rencontrer de nouveau « cet ami de longue date, qui a été toujours aux côtés de son père, feu Ezzedine Gannoun » surtout pendant la création du Centre. « Pour nous, il est un modèle de persévérance, un modèle de générosité artistique et humaine », a-t-elle confié à l’assistance.
De l’agriculture à la culture…
L’artiste tunisien Ali Bennour qui a animé avec beaucoup d’humour a revenu sur quelques pages de la vie de Mbia, rappelant à l’assistance que dans les années soixante Ambroise Mbia est parti étudier en France pour devenir un ingénieur agronome. Parallèlement à ses études, le jeune Mbia a obtenu « une bourse du gouvernement français, alors il s’est inscrit à l’Ecole nationale supérieur des arts et techniques du théâtre, longtemps connue comme l’école de la rue Blanche », et plus tard à l’Ecole d’art dramatique Armel Marin à Paris. Un vrai tournant dans le parcours de ce jeune camerounais... « Un jour, il passe une audition pour un rôle qui va lui ouvrir les portes de l’Odéon-théâtre de France où il va rester 7 ans au théâtre national français », a souligné Ali Bennour.
Au service de l’Afrique
Armand Abanda Maye, le chef de mission camerounaise, lors des JTC a fait savoir Ambroise Mbia est une fierté camerounaise et africaine, rappelant les nombreux festivals que ce metteur en scène a créé et les différentes responsabilités qu’il a assumé au fil de sa carrière qui s’étend sur plus de 60 ans. Il a également mis l’accent sur l’attachement de Mbia à son pays et à son continent, rappelant que pour la célébration de ses 50 ans de scène, il a monté une pièce intitulée « La femme et le colonel » qui a réuni une péliade de compétences artistiques africaines. L’œuvre a été écrite par le Congolais Emmanuel Dongala, mise en scène par le Tchadien Vangdar Dorsouma qu’assistait la Camerounaise Elise Mballa Meka et le rôle principal a été confié à la comédienne béninoise Florisse Adjanohoum. L’intervenant a souhaité qu’Ambroise Mbia accepte d’être parmi le corps enseignant et le conseil de l’Institut national des arts et de la culture qui sera bientôt inauguré au Cameroun.
Présente dans la salle, la comédienne béninoise Florisse Adjanohoum qui participe aux JTC avec « Et que mon règne arrive » de Odile Sankara et qui a partagé avec Mbia la scène, dans la pièce « La femme et le colonel », a mis l’accent sur les qualités exceptionnels d’un artiste méticuleux qui prend soin de tous les détails.
« C’est notre père. Il veille sur nous comme veille un père sur ses enfants et sa famille » a déclaré Issa Yinkou qui joue dans « La dernière aimée » de Mbia.
Acteur, metteur en scène et conteur burkinabé, Hassan Kouyaté a rappelé dans son intervention qu’il connait Mbia depuis qu’il a été enfant. « Je le voyais toujours avec mon père. J’ai appris le théâtre en le regardant et c’est grâce à lui aussi et à d’autres que les Francophonies à Limoges dont je suis le directeur et le programmateur ont accueilli et continuent à accueillir le théâtre africain dans sa diversité et sa richesse ».
Avec des fleurs et des youyous à la camerounaise, la rencontre s’est clôturée. Pour ce soir, certes la remise du Tanit d’honneur fera sensation à la salle de l’opéra.
Imen Abderrahmani