A partir du 1e janvier 2025, le citoyen se trouve obligé de payer plus cher les consultations médicales. La nouvelle année a coïncidé avec l’annonce de l’augmentation des honoraires médicaux, sans avoir pris en compte, à priori, certaines autres vérités et contraintes qui risquent de faire beaucoup de mal, plus que la maladie elle-même, au pauvre citoyen.
Ceux qui ont décidé et imposé une telle augmentation sont montés au créneau pour la justifier, mais il est évident que leur raisonnement a besoin, lui aussi, d’une consultation plus approfondie pour pouvoir convaincre.
D’ailleurs, cette décision n’a pas manqué de susciter des réactions diverses dans un contexte aussi difficile. Cette augmentation est-elle justifiée et prend-elle en considération le pouvoir d’achat de plus en plus entamé du citoyen ?
Selon les décideurs, trois facteurs principaux expliquent cette révision des tarifs.
Il y a, en premier lieu, le facteur de l’inflation, toujours galopante et persistante. Avec un taux qui tourne aux alentours de 7 %, la hausse des coûts de la vie (loyers, biens, services) rend inévitable une augmentation des honoraires. Les tarifs n’ayant pas été révisés depuis deux ans, cette mesure vise à compenser la perte de pouvoir d’achat des médecins.
Là, tout parait discutable. La dernière augmentation date de moins de deux ans, ce qui rend la nouvelle augmentation injustifiable et inadmissible car le citoyen n’a pas encore digéré la première révision des tarifs qu’il se trouve contraint à subir une seconde augmentation !
De même, le taux d’inflation est, depuis de longs mois, maitrisable et a même régressé durant le dernier trimestre 2024. Il s’agit, là, d’une raison qui est loin de convaincre.
La seconde raison est d’ordre fiscal. D’après les « architectes » de cette augmentation, la fiscalité s’est alourdie pour les professionnels de ce secteur car l’impôt sur le revenu pour la tranche concernée est passé de 35 % à 40 %, tandis que la TVA de 7 % s’applique également aux consultations. Au total, estime-t-il, près de 47 % des honoraires sont directement prélevés par l’État, justifiant une révision des tarifs pour maintenir la viabilité financière des cabinets médicaux.
Or, qu’on le veuille ou pas, nous savons tous que les médecins de libre pratique paient le fisc avec une formule forfaitaire qui est loin d’obéir à la justice fiscale. Il s’agit d’un problème qui persiste toujours avec une balance qui penche de manière évidente et peu convaincante du côté des médecins.
La troisième raison invoquée concerne l’exode continu des compétences en matière de médecine. Là, il est vrai que la Tunisie fait face à un exode massif de ses médecins vers des pays offrant de meilleures conditions de travail. D’après les défenseurs de cette augmentation de tarifs, elle vise à garantir un revenu minimum suffisant pour retenir ces compétences et les persuader de rester au pays. Or, cette augmentation ne va pas rapporter beaucoup d’argent à un médecin débutant qui est séduit par des salaires beaucoup plus consistants à l’étranger et qui rêve de gagner au moins quatre à cinq fois ce qu’il perçoit en Tunisie.
Aujourd’hui, si l’Etat juge qu’il est urgent et essentiel d’améliorer les revenus des médecins et des services sanitaires divers, il doit leur trouver d’autres formules que le recours, à chaque fois, à l’augmentation des tarifs.
C’est dire que des solutions plus réfléchies et plus ciblées doivent faire partie du menu d’une réforme qui doit prendre en compte l’intérêt du médecin et le besoin de lui fournir des garanties et des encouragements pour le persuader de rester dans son pays, mais également celui du citoyen qui ne doit pas payer de sa santé des décisions hâtives peu conformes avec la réalité de tous les jours.
Kamel ZAIEM