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Rétrospective 2024 : Chronique d’une année de braise …

Par Chokri Baccouche

La scène, imaginaire, se passe dans une classe d’élèves regroupant des adultes anticonformistes. Actualité oblige, l’enseignant de cette bande de joyeux lurons déclare solennellement que 2024 a été porteuse de bonnes nouvelles pour l’ensemble de l’humanité et demande par conséquent si ses protégés partageaient son opinion. Contre toute logique, une forêt de doigts s’est levée d’un coup en signe d’acquiescement apparent et le comble c’était la bonne réponse. On l’aura certainement deviné, les joyeux compères n’avaient pas levé le pouce mais un doigt d’honneur bien tendu à la verticale pour exprimer leur hostilité et leur désaccord. 2024 qui s’apprête à nous quitter sur la pointe des pieds aura été, en effet, une année particulièrement stressante. Elle a été marquée par de profonds bouleversements géopolitiques et des conflits prolongés. Le Moyen-Orient continue, malheureusement, à occuper le haut du pavé dans ce capharnaüm planétaire avec la guerre à Gaza qui n’a pas encore fini de révéler toutes ses horreurs, ses heurts et ses insoutenables malheurs. 2024 a été en effet l’année des génocides et des destructions par excellence ayant pour principal théâtre l’enclave palestinienne sinistrée. Le millésime finissant a offert pour la postérité l’effroyable souffrance endurée par ce peuple martyre, victime d’une épuration ethnique sioniste qui continue à lutter pour sa survie avec la force de la foi. Plus de 45 mille Palestiniens dont près de 15 milles enfants ont été massacrés par l’armée sioniste. Le sinistre feuilleton de la mise à mort délibéré de ce peuple en détresse livré à son triste sort par la communauté internationale se poursuit encore. Parqués dans des camps de fortune et affamés, les survivants palestiniens de ce véritable holocauste subissent les rigueurs de l’hiver et des maladies. A Gaza, l’humanité est passé de vie à trépas. Elle est morte et enterrée, en même temps que les femmes et les enfants palestiniens ensevelis sous les décombres et les gravas des immeubles bombardés par l’aviation sioniste.

A Gaza, le peuple palestinien souffre mais fait preuve également d’une remarquable détermination à  briser les chaines de la servitude. Après près de deux années de guerre, la résistance palestinienne n’en démord pas, malgré la perte de nombre de ses leaders dont notamment Yahia Sinwar et Ismaïl Haniyeh. Elle continue à puiser son énergie combattive dans sa volonté indélébile de forcer le destin de tout un peuple afin de lui permettre enfin de recouvrer sa liberté et de vivre en toute autonomie sur la terre de ses ancêtres. L’année 2024 a été marquée par la décision historique de la Cour Pénale Internationale qui a émis des mandats d’arrêt contre le chef du gouvernement israélien Benjamin Netanyahu et son ancien ministre de la Défense Yoav Gallant pour crimes de guerre. De nombreux pays européens se sont engagés à appliquer le verdict de la CPI. Il s’agit d’une première qui aura inévitablement des conséquences politiques, ce qui n’est pas peu. Les exactions effroyables commises par les deux responsables sionistes contre les Palestiniens, sont certainement à l’origine de la volte-face des Européens qui ont soutenu jusque-là à bras-le-corps le régime de Tel-Aviv.

La guerre au Liban est une autre tragédie qui a marqué l’année 2024. Elle a été délibérément déclenchée par le Premier ministre israélien Netanyahu dans le but d’étendre le conflit pour échapper à la justice de son pays et assurer son maintien au pouvoir. Elle a généré également beaucoup de pertes parmi les populations civiles du pays du cèdre. Dans son délire faussement messianique, Netanyahu s’est attaqué au Liban pour imposer une « pax israéliana » et remodeler le Moyen-Orient conformément à ses desiderata. Hassan Nasrallah, le chef du Hezbollah ainsi que de nombreux leaders du mouvement chiite libanais ont fait l’objet d’un assassinat ciblé. Israël a marqué des points mais la résistance libanaise a plié, mais n’a pas cassé pour autant. Elle a repris très vite ses esprits et tenu la dragée haute à l’assaillant sioniste. La trêve signée par les deux belligérants a été régulièrement violée par les responsables sionistes qui confirment, encore une fois, leur réputation de ne respecter aucun de leur engagement et de violer en toute impunité toutes les lois et les conventions internationales.

Au Levant, la chute du régime de Bachar el-Assad a ouvert une période de transition chaotique en Syrie. Un pouvoir de fait, dominé par des factions sunnites rigoristes, tente de stabiliser la situation. Il doit composer avec des factions djihadistes majoritaires dans ses structures, tout en désamorçant les tensions entre les Turcs et les Kurdes du Rojava, sans céder aux revendications libérales des Forces démocratiques syriennes (FDS). Ce nouveau pouvoir doit maintenir son ancrage idéologique tout en rassurant les chrétiens et les secteurs laïcs de l’opinion syrienne afin d’éviter des fractures internes. En parallèle, il cherche à fédérer un front anti-iranien sans basculer dans un anti-chiisme radical, s’inspirant d’un nationalisme arabe réactualisé et foncièrement anti-perse. La chute de Bachar El Assad ressemble à s’y méprendre à celle de Saddam Hussein. Elle a été théâtralisée à la hollywoodienne dans le cadre d’une mise en scène qui donne l’impression du déjà vu. Au moment où l’armée israélienne, profitant du renversement d’El Assad, s’est engouffrée en territoire syrien en prenant soin de décimer tout l’arsenal et l’infrastructure militaire syriens, le groupe islamiste Hayet Tahrir al-Cham qui se veut l’architecte de l’insurrection contre le régime, n’a pas daigné bouger le petit doigt pour s’opposer à l’envahisseur. La réponse à cette « énigme » est d’une simplicité puérile. L’avenir de la Syrie qui fait l’objet de convoitises des puissances régionales et internationales et d’un enjeu géopolitique majeur est plus qu’incertain.

En 2024, le conflit russo-ukrainien s’est mué, par ailleurs, en une guerre d’usure prolongée. Les forces russes ont maintenu leur pression, tandis que Kiev, soutenue par ses alliés occidentaux, a opposé une résistance acharnée mais qui commence à s’étioler. Les pertes humaines et matérielles générées par cette sordide guerre sont considérables. Moscou, appuyée par la Chine, l’Iran et la Corée du Nord, a réussi à maintenir son arsenal militaire malgré les sanctions occidentales et les livraisons d’armes à l’Ukraine. Le tragique feuilleton de ce conflit va apparemment se poursuivre encore pour un bon bout de temps. A moins bien sur que les belligérants, directs et indirects, daignent enfin donner une chance à la paix.

Bref, 2024 n’a pas été du tout tendre pour l’ensemble de l’humanité. Elle a été le miroir d’un monde en débandade en proie aux guerres, aux crises humanitaires et aux recompositions politiques qui ont transformé les relations internationales et alimenté les tensions et les incertitudes. De quoi sera fait demain ? Bien malin celui qui saura donner une réponse précise à cette question lancinante. Positivons malgré tout car, tant qu’il y a la vie, il y a de l’espoir. L’espoir qu’en 2025 qui va bientôt prendre la relève, la paix en Palestine, en Ukraine, en Syrie, au Soudan et partout ailleurs dans le monde, soit au rendez-vous. Croisons les doigts pour qu’il en soit ainsi. Bonne année à tous.

C.B.

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