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Israël traduit à La Haye pour génocide à Gaza : Rendre justice aux Palestiniens ou perpétuer le monstre israélien

De l’envoyé spécial à La Haye Soufiane Ben Farhat


Il y a des matches qui se jouent dès la première mi-temps. Ainsi en est-il de la séance d’hier à la Cour Internationale de Justice (CIJ) de La Haye où l’Afrique du Sud a étayé sa requête adressée à la Cour, accusant Israël de génocide à Gaza.


Pas moins de huit juristes sud-africains de haute voltige se sont succédés à la barre. En face d’eux, les quinze juges de la CIJ semblaient médusés, s’empressaient de prendre des notes, roulaient de grands yeux. Non pas tant pour le froid extrême sévissant à La Haye (moins 4 degrés ressentis moins 9). Mais le rouleau compresseur de la vérité rappelée avec panache et brio révulse parfois même ceux qui en savent quelque chose.


Une réalité accablante
Et puis il s’agit d’une requête qui n’a rien de la rhétorique verbeuse, les assertions tendancieuses ou le parti pris aveugle. Et pour cause : le document de 84 pages soigneusement rédigé par certains des meilleurs experts internationaux en matière de génocide. C’est en fait une requête factuelle, émaillée de preuves à l’appui et de faisceaux d’indices. L’argumentaire juridique y est pointilleux et méthodique, qui fait fi des envolées lyriques et autres formules à l’emporte-pièce. Les faits décrits crescendo sont concrets et accablants, péremptoires et brutaux au besoin. Parce qu’ils découlent d’une réalité on ne peut plus brutale et sanguinaire.

Les actes intentionnels et prémédités de génocide commis par l’armée israélienne principalement à Gaza y revêtent sept catégories principales.
Il y a tout d’abord l’ampleur de la tuerie en règle depuis 96 jours, qui dépasse aujourd’hui les 23 mille morts, dont 70 % sont des femmes et des enfants, sans parler des 7 mille disparus et des 55 mille blessés et mutilés. Et puis le traitement cruel, inhumain et dégradant d’un nombre grandiose de civils, y compris des enfants. Principalement ceux arrêtés, qui ont eu les yeux bandés, qui ont été déshabillés par l’armée d’occupation et laissés dehors par temps froid, avant d’être embarqués pour des lieux inconnus. Les faits patents s’imbriquent. Ainsi en est-il des fausses et pernicieuses promesses de sécurité à des fins démentielles, Israël bombardant les zones vers lesquelles il avait conseillé via des tracts aux résidents de fuir.
Autre cruauté systématique et non des moindres, l’interdiction systématique d’accéder à la nourriture et à l’eau, ce qui a plongé la population de Gaza dans la famine. Les privations d’accès à un logement, des vêtements et une hygiène élémentaire ne sont pas moindres. Israël détruit méthodiquement le système de santé à Gaza où seulement 13 des 36 hôpitaux sont encore partiellement fonctionnels. La requête décrit comment les forces armées israéliennes détruisent les générateurs des hôpitaux, les panneaux solaires, les stations d’oxygène, les réservoirs d’eau, les ambulances, les convois médicaux et les premiers intervenants. L’avant-dernier point rappelle la destruction de la vie palestinienne dans son intégralité à Gaza, les villes et les villages rasés, les maisons et les immeubles bombardés laissant place aux décombres, les infrastructures méthodiquement mises en pièce, les écoles et universités réduits en cendres suite à des dizaines de milliers de bombardements, la culture palestinienne est bafouée.
Le dernier point est accablant. Il reprend verbatim les expressions de l’intention génocidaire à l’encontre du peuple palestinien par des représentants d’Israël. Il s’agit notamment des références du Premier ministre Benyamin Netanyahou au récit biblique de la destruction totale d’Amalek par les Israélites, la déclaration du président Isaac Herzog selon laquelle « c’est toute une nation qui est responsable », et l’affirmation du ministre de la Défense Yoav Gallant selon laquelle Israël se bat contre des « animaux humains ».
Des mesures conservatoires
L’Afrique du Sud requiert la décision urgente de mesures conservatoires de la part de la CIJ pour parer à l’irréparable, le génocide avéré en étant une parfaite illustration. Elles convergent toutes vers un jugement en référé requérant l’arrêt immédiat de la guerre israélienne à Gaza et ailleurs et tout ce qui s’ensuit ou en découle.
Au fur et à mesure des plaidoyers, l’atmosphère devenait plombée, suintant la douleur de l’enfer, l’odeur fétide de la mort, l’insoutenable conscience de la tragédie en direct sur les écrans des télés et des smartphones. Les juristes sud-africains avaient pourtant prévenu. "Nous vous décidé de passer le moins possibles de vidéos, pour que cette plaidoirie ne devienne pas un théâtre". Les renvois aux vidéos insoutenables sont contenus dans la requête introductive.
Un plaidoyer de trois heures qui n’en finissait pas au bout du compte de torturer ceux pour qui, on en sonne le glacial rappel.
Tout à coup les griffes du froid sévissant à La Haye revêtent les griffes de la grande faucheuse. On a l’impression de mourir et de n’en finir guère de sombrer de l’autre côté du temps, là où tout est vaine souffrance, cruel anéantissement, là où la mort de chaque enfant, chaque femme, chaque palestinien équivaut à la mort de toute l’espèce humaine. Sous le regard du monde dit libre et civilisé, qui appuie en sourdine et feint de ne rien voir.
La Cour Internationale de Justice sauvera-t-elle les lambeaux des oripeaux d’un Occident chancelant sous le poids de sa fausse conscience à laquelle il ne croit plus ? Ou bien les manœuvres de coulisses des Américains et des Israéliens à La Haye auront-elles encore une fois raison en dépit et aux dépens de la vérité et de la justice ? Le choix est, on ne peut plus évident.Rendre justice aux Palestiniens ou perpétuer le monstre israélien. Au fait n’est-ce pas Goya qui disait que le sommeil de la raison engendre des monstres !
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