La filière de la viande rouge en Tunisie, qui englobe les viandes bovines, ovines et caprines, joue un rôle significatif dans l'économie agricole du pays.
Avec plus de 300 000 personnes impliquées à divers niveaux de production et de commercialisation, ce secteur représente environ 16% du produit brut national. Cependant, il fait face à des transformations nécessaires pour s'adapter aux réalités économiques contemporaines.
Demande fluctuante
La consommation de viande rouge en Tunisie a connu une baisse notable ces dernières années, passant de 9,5 kg par habitant en 2020 à seulement 8 kg en 2022. Cette diminution est principalement attribuée à des défis liés au pouvoir d'achat des ménages tunisiens.
Le marché, caractérisé par une offre limitée et une demande fluctuante, révèle des tensions entre production et consommation. Les acteurs du secteur, tels que Tarek Ben Jazia de la société Ellouhoum, soulignent que la production nationale tourne autour de 127 000 tonnes par an, insuffisante pour répondre à une consommation qui continue de se contracter.
Le secteur des viandes rouges est également un vecteur d'enjeux socio-économiques majeurs. Les pouvoirs publics commencent à porter un intérêt accru à cette filière, reconnaissant son potentiel pour générer des emplois et soutenir les revenus des agriculteurs.
Des discussions entre éleveurs, commerçants et institutions publiques ont été initiées pour aborder les défis rencontrés sur le terrain. L'amélioration des conditions d'élevage et la formation professionnelle des acteurs sont perçues comme essentielles pour revitaliser cette industrie.
Enjeux du secteur
La filière de la viande rouge en Tunisie est confrontée à plusieurs défis majeurs qui entravent son développement et sa durabilité. Parmi ces enjeux, on note l'absence de régulation adéquate des abattoirs, la fluctuation des prix, ainsi que les défis liés à la production et à la consommation.
L'un des principaux défis réside dans l'état des infrastructures d'abattage. Environ 150 abattoirs ne sont pas agréés, ce qui compromet la qualité sanitaire des produits. Le manque de supervision vétérinaire et de contrôle sanitaire dans ces établissements aggrave la situation. Malgré un plan de mise à niveau élaboré, son application reste en suspens, laissant le secteur dans une précarité qui nuit à sa réputation et à sa compétitivité sur le marché.
Parallèlement, les prix de la viande rouge continuent d'augmenter, rendant cette denrée alimentaire moins accessible pour une grande partie de la population. La consommation annuelle par habitant est restée bien en dessous des normes observées dans les pays développés, exacerbée par un pouvoir d'achat en baisse. Cette situation pousse les consommateurs vers des alternatives moins coûteuses, comme les viandes blanches, réduisant ainsi la part de marché de la viande rouge.
Le secteur fait face à des défis liés à la production elle-même. Les aléas climatiques affectent la disponibilité des fourrages, ce qui entraîne une instabilité dans l'élevage. De plus, le faible encadrement technique des éleveurs limite l'amélioration des pratiques d'engraissement et de productivité. Les acteurs du secteur appellent donc à une réforme structurelle visant à moderniser les pratiques agricoles et à renforcer les capacités des éleveurs pour garantir une offre suffisante et de qualité.
Importance de la régulation
Face à la volatilité des prix sur le marché international, les acteurs tunisiens plaident pour une régulation plus efficace. La récente tentative d'importation de viande rouge a échoué en raison des coûts prohibitifs sur le marché mondial. Par ailleurs, des observateurs suggèrent que subventionner l'alimentation animale pourrait stabiliser les prix locaux et améliorer les marges bénéficiaires des producteurs. De plus, l'augmentation régulière du prix du lait est envisagée comme un moyen d'équilibrer les revenus des éleveurs.
La filière de la viande rouge en Tunisie se trouve à un carrefour décisif. Pour naviguer dans ce paysage complexe, il est impératif d'adopter des réformes stratégiques qui non seulement soutiennent les producteurs locaux mais aussi répondent aux besoins croissants d'une population en quête d'une alimentation accessible et durable.