Après l’inscription des « arts des ṭwayef de Ghbonten » sur la liste du patrimoine mondial de l’humanité, la Tunisie a réussi dans le cadre d’une candidature arabe commune d’inscrire le henné avec tout le symbolique et les rituels autour de cette pratique.
Trésor culturel arabe et pratique commune, évidemment avec des spécificités pour chaque pays, le henné a réussi à unir les experts du patrimoine et à avoir la reconnaissance internationale après son inscription sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO. Plante aux multiples vertus, le henné a été présenté dans une candidature historique portée par l’Algérie, l’Arabie saoudite, Bahreïn, l’Égypte, les Émirats arabes unis, l’Iraq, la Jordanie, le Koweït, la Mauritanie, le Maroc, le Sultanat d’Oman, la Palestine, le Qatar, le Soudan, la Tunisie et le Yémen. Candidature exceptionnelle réunissant seize pays qui ont défendu ce savoir-faire ancestral et une pratique bien enracinée dans le quotidien de ces peuples. Du Maghreb au Golfe, la pratique de henné diffère. A chaque pays, ses rituels. En Tunisie, le henné accompagne les Tunisiens et les Tunisiennes dans les différentes étapes de leur vie. Symbole du bonheur et des célébrations, le henné est une composante essentielle des fêtes de mariage. Toute une cérémonie lui est réservée.
Considéré comme l’une des plantes du paradis, le henné a fait en Tunisie la renommée des oasis de Gabès. Grande productrice de cette plante, Gabès a réservé tout un souk à ce henné du bonheur.
De la naissance à la mort
« Le meilleur henné local, le « henné main » ou le « henné rouge » pour les cheveux, est celui qui pousse dans les oasis de Gabès. Récoltées en été, les feuilles sont mises à sécher au soleil, pendant deux jours environ, sans oublier d’être recouvertes la nuit pour les protéger de l’humidité. Broyées, elles seront à nouveau séchées pendant quelques heures.
Selon les usages et les régions, la préparation du henné diffère. À chacune sa recette. La méthode la plus simple est de le mélanger à de l’eau pour obtenir une pâte molle. Il peut être enrichi avec des clous de girofle, de l’ail, de l’eau de fleur d’oranger ou de rose, du citron, du thé rouge bouilli du sucre et de l’huile de menthe sauvage. Après un temps très court, le mélange est prêt à être utilisé », lit-on sur la page de l’Agence de mise en valeur du patrimoine et de promotion culturelle (AMVPPC).
La même source explique que « La pose du henné, aux propriétés purifiantes et à la capacité protectrice, ponctue les rites de passage de la vie, de la naissance à la mort. Avant l’accouchement et quarante jours après, les femmes se teignent les pieds et les mains. Un peu de henné est également placé sur la paume d’un nouveau- né lorsqu'il atteint sa première année, appelée « tajil ». Puis, au moment de la circoncision. IL est présent dès la demande officielle en mariage, lors de la cérémonie des fiançailles, mais le mariage, le passage du statut de célibataire à celui d’épouse, reste le rituel le plus important ». Cette explication est tirée du livre « Patrimoine et terroirs : saveurs et savoirs », publié par Alif Edition en partenariat avec l’AMVPPC. L’ouvrage offrant plus d’informations sur cette pratique festive qui a déjà inspiré de nombreux peintres tunisiens parmi lesquels nous citons Noureddine Khayachi qui a réservé toute une œuvre à « La Hennana I », cette femme dont le métier est d’accompagner la mariée dans les préparatifs du mariage et surtout en ce qui concerne l’application du henné, la préparation et la réalisation du « harkous » et également l’application du maquillage. Le catalogue tunisien des arts plastiques comporte de nombreuses œuvres inspirées des ambiances de la cérémonie du henné ou offrant à voir et admirer des femmes avec les mains ornées de motifs de henné.
Ce henné qui unit…
Le site de l’UNESCO annonçant cette inscription détaille les différents usages de cette plante, mettant l’accent sur sa présence dans les grandes cérémonies.
« Son utilisation est souvent accompagnée de manifestations orales telles que des chants, des chansons, des proverbes et des poèmes, et est liée à des règles et des traditions sociétales vieilles de plusieurs siècles. Celles-ci comprennent le savoir-faire associé à la culture et à l’entretien de l’arbre à henné, ainsi qu’à la préparation et à l’application de la pâte. Les familles et les communautés transmettent les traditions par l’observation et la pratique. Aujourd’hui, les organisations, les centres de beauté, les universités et les médias contribuent également à leur transmission. Composante essentielle des événements traditionnels, les rituels de henné renforcent les liens sociaux et favorisent la communication », lit-on sur le site.
Il est à noter que le nombre des éléments du patrimoine immatériel tunisien enregistré s’élève à neuf dont deux dans le cadre de candidature commune. Il s’agit des « savoirs, savoir-faire et pratiques liés à la production et à la consommation du couscous » qui a réuni quatre pays maghrébins (La Tunisie, l’Algérie, le Maroc et la Mauritanie) et « La calligraphie arabe : connaissances, compétences et pratiques » qui a réuni l’Arabie saoudite, l’Algérie, le Bahreïn, l’Égypte, l’Iraq, la Jordanie, le Koweït, le Liban, la Mauritanie, le Maroc, le Sultanat d’Oman, la Palestine, le Soudan, la Tunisie, les Émirats arabes unis et le Yémen.
Imen Abderrahmani