En 1945, après que la Seconde Guerre a pris fin, se tenait la fameuse conférence de Yalta, où les dirigeants de trois puissances vainqueures, Franklin Roosevelt, Joseph Staline et Winston Churchill, ont déterminé le destin du monde sans aucun égard pour les souhaits des petits États. Aujourd’hui, c’est le même monde vers lequel nous nous dirigeons avec Trump à la Maison Blanche.
L’exemple le plus clair de la nouvelle version de la conférence de Yalta est la façon dont Trump a mené les négociations pour mettre fin à la guerre en Ukraine, forçant le faible président ukrainien, Volodymyr Zelensky, à accepter un accord qui ne tient pas compte de son propre intérêt, mais plutôt de celui des deux puissances, les Etats-Unis et la Russie, sous prétexte que l’Ukraine n’a pas des cartes à jouer. Trump a ensuite ajouté la Chine qui, selon lui, pourrait contribuer à arrêter la guerre.
Trump semble envisager un nouveau rapport de force entre trois pôles: les États-Unis, la Russie et la Chine, dont il juge les dirigeants compatibles avec lui. Le reste du monde, y compris le plus vieil allié des Américains, doit se défendre avec leurs propres moyens.
Pour les Européens, le message de Trump est clair: «Je ne vous défendrai plus et je vais vous imposer plus de droits de douane».
Ce qui a surpris le monde, c’est la rapidité avec laquelle Trump a renversé la position des Etats-Unis envers le reste du monde. Le ministre des Affaires étrangères, Marco Rubio, a tout récemment annoncé qu’il avait réduit de 83 % les programmes d’aides étrangères des États-Unis. Trump a coupé le soutien militaire et sécuritaire à l’Ukraine pour la forcer à soutenir son plan visant à arrêter la guerre. Cela a été convenu lors d’une réunion à Djeddah, en Arabie saoudite. Trump a également rapidement démantelé l’opposition à la Russie, ce qui a suscité l’émerveillement du porte-parole du Kremlin: «La nouvelle administration a rapidement changé tout le cours de sa politique étrangère qui est conforme à notre vision».
Cette vision trumpienne d’un nouveau monde fondé sur le principe de la main qui donne est la main qui dirige invite le reste du monde à se reconsidérer et à repenser la nature des alliances actuelles qui ne tiennent plus. En fait, Trump a, peut-être, commis une grave erreur en méprisant l’Europe, qui semble retrouver sa voix après des décennies de suivisme aveugle à Washington. Les dirigeants européens sont tellement préoccupés par la Russie expansionniste qu’ils sont prêts à adopter une position ferme en Ukraine et à y envoyer des troupes pour dissuader toute nouvelle agression après le cessez-le-feu. Les Russes ont exprimé leur colère contre toute présence européenne en Ukraine, mais les pays du Vieux Continent s’en tiennent à leur position, et la question est de savoir si Trump s’alignera avec Vladimir Poutine contre ses alliés les plus proches.
En toute évidence, l’hostilité de Trump a poussé les Européens à compter sur leurs propres moyens afin de contrecarrer les mesures économiques restrictives que le locataire du Bureau Ovale leur réserve.
Ainsi, tout semble être chamboulé. Un nouvel ordre mondial se dessine dans lequel il n’y aura plus de place que pour les forts. Ce qui invite à s’interroger sur le sort des pays arabes sur cette nouvelle carte géopolitique.
Ce que le Hamas a commencé à Gaza avec le déluge d’Al-Aqsa et ce qui s’est passé en Syrie a, sans doute, redistribué toutes les cartes dans la région du Moyen-Orient.
Comme en Ukraine, Donald Trump a adopté la même stratégie pour mettre fin à la guerre à Gaza. Sans mâcher ses mots, il a demandé à l’Egypte et à la Jordanie d’accueillir les Palestiniens de l’enclave palestinienne en menaçant de fermer la vanne des aides financières à ces deux pays arabes.
Pour une fois, les dirigeants arabes ont dit un non catégorique au plan du Trump. Ce dernier a fini par renoncer au déplacement forcé des Palestiniens de Gaza.
En fait, ce qu’il faut pour que les pays arabes retrouvent leur place sur la nouvelle carte géopolitique qui se dessine. L’unité et rien que l’unité permettra aux dirigeants arabes de s’imposer comme une force régionale non négligeable et éviter d’être à la merci des grands de la nouvelle conférence de Yalta.
J.H.