Par Chokri BACCOUCHE
Il ne suffit pas de tuer les cadres d’un mouvement pour que celui-ci disparaisse ou soit «éradiqué» pour paraphraser les propos outrecuidants, chers au Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu. L’entité sioniste vient de l’apprendre à ses dépens. Quelques mois après l’assassinat de Yahia Sinwar, le chef des Brigades Al-qassam, le bras armé du Hamas, considéré comme l’architecte de l’opération «Déluge d’Al-Aqsa» du 7 octobre 2023, la relève est, en effet, déjà en place. Dans une enquête publiée il y a quelques jours, le Wall Street Journal révèle ainsi que Mohamed Sinwar, le frère cadet de Yahia Sinwar, a repris le flambeau de la résistance et s’attelle depuis quelque temps à la reconstruction du mouvement à travers le recrutement massif de nouveaux combattants. Bien qu’il ne dispose pas de statistiques précises, le média américain affirme, sur la foi d’informations fournies par les services de renseignement sionistes, que des milliers de jihadistes palestiniens ont rejoint les rangs du Hamas, prêts à en découdre avec l’armée israélienne dans ce qui semble devenir une véritable guerre d’usure à durée indéterminée.
Malgré le fait que Gaza ait été réduite en cendres, malgré les milliers de morts civils, les destructions massives de toute l’infrastructure de base de l’enclave palestinienne sinistrée, la résistance palestinienne plie mais ne casse pas. N’ayant rien à perdre et tout à gagner, elle reprend au contraire du poil de la bête et continue à tenir la dragée haute à l’occupant israélien. C’est une nouvelle génération de jeunes volontaires qui prend ainsi le relais pour poursuivre le combat, sans relâche et sans peur. Benjamin Netanyahu, qui a poussé les limites de l’horreur à leur paroxysme dans l’hypothétique espoir de briser le moral des Palestiniens, en a eu pour son grade. Sa campagne de la terreur qu’il mène depuis près de deux ans lui a valu non seulement les lauriers du plus grand criminel de guerre du 21e siècle, mais n’a pas réussi également et surtout à casser la détermination des Palestiniens à briser les chaînes de la servitude. Il faut dire que le Premier ministre sioniste a tout faux dès le départ. Il a commis en effet une bourde monumentale en pensant que le Hamas n’était qu’un simple mouvement de résistance et qu’il suffisait de l’éradiquer pour que la situation revienne à la normale et que les Palestiniens finissent pas accepter le fait accompli. Dans son délire léonin, imbu de l’appui inconditionnel de ses puissants alliés, il avait pensé que la mise à mort du Hamas était une simple sinécure, une affaire qui sera vite réglée en l’espace de deux ou trois semaines tout au plus, comme il n’avait cessé de le claironner à tout va. Il s’est lourdement trompé bien évidemment, car ses divagations ubuesques lui ont fait oublier que le Hamas est une simple idée qui répond aux aspirations légitimes de tout un peuple. C’est la raison pour laquelle d’ailleurs cette idée a été massivement adoptée par tous les Palestiniens qui la considèrent désormais comme le seul moyen et l’unique alternative à même de leur permettre de recouvrer leur liberté et leurs droits spoliés.
Il faudrait être aveugle et atone pour ne pas admettre cette vérité qui crève pourtant les yeux. Le roi Sinwar est mort donc, vive le roi… Sinwar. Comme quoi, un train de la résistance cache toujours un autre, c’est-à-dire qu’on remet forcément le compteur à zéro et ainsi de suite jusqu’à l’infini. Les dirigeants sionistes, qui n’en ont pas fini avec la fratrie des Sinwar, vont certainement chercher à liquider Mohamed comme ils l’avaient fait pour son frère Yahia en octobre 2024. Mais là aussi, ils se gourent lourdement, car des Sinwar, il y en a des tas chez les Palestiniens, non pas des individus qui portent le même nom, mais des résistants au caractère trempé dans le même acier du patriotisme sincère et prêts à sacrifier leur vie sur l’autel de la liberté de leur peuple et de l’indépendance de leur pays.
Finalement, on peut dire sans risque de se tromper que la brutalité extrême de Netanyahu a, paradoxalement, galvanisé le moral de la résistance palestinienne et boosté sa détermination à poursuivre le combat jusqu’au bout. Passés maitres dans l’art de la guérilla et du système «D», les combattants du Hamas récupèrent tout ce qui passe sous leurs mains, y compris les bombes sionistes non explosées déversées à Gaza qu’ils réutilisent comme bombes de fortune. Les dix soldats israéliens qui ont trouvé la mort, la semaine dernière à Beït Hanoun dans le nord de Gaza, ont été justement victimes de cet «échange de bons procédés». Comme quoi l’envoyeur n’est jamais à l’abri d’un retour fracassant de sa propre marchandise toxique ou l’arroseur arrosé à son tour. La guerre à Gaza est en passe de se vietnamiser et c’est le moins qu’on puisse dire, au grand dam de Netanyahu qui a tout fait pour l’éterniser indéfiniment…
C.B.