En annonçant, très récemment, la réception d’un dernier lot de bus usagés importés de France et la conclusion d’un marché avec constructeur chinois pour l’acquisition prochaine de 300 bus flambant neufs, les autorités tentent de freiner petit à petit et avec les moyens de bord, la décadence du service du transport public dans le Grand Tunis, et dans une étape ultérieure dans l’ensemble du pays. Des initiatives, bien qu’appréciables, semblent pourtant s’inscrire dans la même logique du court-termisme qui caractérise malheureusement les politiques publiques engagées, sans grande conviction, au cours des longues dernières années. Pour un service vital et névralgique qui est transport, ce qui est annoncé est insuffisant et ne saura répondre aux attentes et apaiser des souffrances profondes des millions d’usagers livrés à leur triste sort.
Flotte délabrée, retards récurrents, grand désordre logistique, insécurité et inconfort des trajets aggravent chaque jour la frustration des citoyens. Pour les usagers, le quotidien est un parcours d’obstacles. Ce ne sont toutefois pas des moments d’angoisse renouvelés que l’on s’inflige chaque jour, mais un calvaire qui matérialise l’injustice sociale. Ceux qui dépendent exclusivement du transport public sont souvent les individus les moins favorisés.
L’importation de bus usagés ou même l’acquisition de nouvelles rames, bien que nécessaires, ne suffisent donc pas à résoudre le problème à sa racine. Il est urgent de repenser fondamentalement le modèle de gestion du transport public dans notre pays. Cela commence par l’implémentation des plans de restructuration dans toutes les compagnies publiques de transport urbain qui s’intègrent dans des politiques ambitieuses réalistes et réalisables de modernisation des infrastructures. Car au-delà des finances, c’est une vision stratégique qu’il faut instaurer: une vision qui place le citoyen au cœur des priorités.
Réhabiliter le transport public n’est donc pas seulement une question de logistique, mais aussi exigence de justice sociale. Cela passe par des investissements ciblés dans des infrastructures modernes et inclusives qui répondent aux besoins des régions marginalisées, souvent les plus touchées par le déclin des services. Le Président de la République ne cesse d’ailleurs de plaider pour un État au service des citoyens, où l’accès aux services essentiels, comme le transport est un droit fondamental.
Une modernisation réussie reste toutefois conditionnée par la capacité à s’adapter aux changements par l’introduction de solutions innovantes et écologiques, comme des véhicules électriques ou hybrides, et par l’amélioration de la connectivité entre les différents modes de transport. Des partenariats public-privé, une meilleure gouvernance, et un cadre réglementaire souple et incitatif sont de nature à apporter un souffle nouveau à un secteur en grande difficulté. En effet, les souffrances des usagers ne peuvent être soulagées que par des actions volontaristes et audacieuses. Il est également temps de regarder au-delà de nos frontières, pour s’inspirer des expériences réussies dans les pays qui ont su construire un service public décent, durable et de qualité comme le supposaient le devoir de tout Etat qui se respecte, d’utiliser à bon escient l’argent des contribuables.
H.G.