La chute spectaculaire du régime de Bachar Al Assad en Syrie provoquera, sans doute, des changements géopolitiques radicaux dans la région du Moyen-Orient. En fait, la Syrie était, tout au long de la dernière décennie, une arène de conflits stratégiques entre les puissances régionales et internationales qui ont mis le chaos dans le pays. Aujourd’hui, les Syriens aspirent à un avenir meilleur et à une transition démocratique pacifique.
Alors que les Syriens se préparent à se construire une nouvelle vie, tous les projecteurs sont désormais braqués sur la Libye où la division et le chaos persistent depuis déjà des années.
Les factions libyennes pataugent depuis plus d’une décennie dans un état de stagnation politique qui a entravé l’unification du pays. Suite à la nouvelle donne en Syrie, la Libye semble être un terrain propice pour devenir la prochaine arène des conflits géostratégiques entre les grandes puissances mondiales.
La chute d’Al Assad affectera, certes, cet équilibre fragile entre le gouvernement d'Oussama Hammad à Tripoli, soutenu par le Parlement et le maréchal Khalifa Haftar à Benghazi.
D’ailleurs, il n’est plus secret que le régime d'Al Assad apporte depuis longtemps, directement ou indirectement, un soutien à l'administration répressive du maréchal Khalifa Haftar et de ses fils, à travers une idéologie commune basée sur l'autoritarisme, le régime oligarchique et les réseaux commerciaux illicites qui ont contribué à maximiser leur richesse.
C'est pour cette raison que le gouvernement de Haftar a rouvert l'ambassade de Libye à Damas en 2020. Une décision qui a été encouragée et facilitée par les Émirats arabes unis, qui ont longtemps joué un rôle politique et militaire de soutien et qui dirigeaient alors les efforts arabes pour normaliser leurs relations avec le dictateur syrien.
Les récents développements en Syrie et la rupture soudaine de ces liens ont placé Haftar et son groupe dans une nouvelle situation inconfortable qui pourrait l'inciter à reconsidérer ses orientations politiques à l'intérieur et à l'extérieur du pays, d'autant plus que l'un de ses principaux soutiens extérieurs est également sous pression, en référence aux Russes.
L’impasse politique libyenne, qui a empêché le pays de progresser vers la fin de la période de transition en établissant un pouvoir exécutif élu par le peuple et en résolvant d’importantes divisions institutionnelles, pourrait s’aggraver et attiser les flammes du conflit dans un avenir proche.
Le chef du gouvernement libyen d’unité nationale, Abdel Hamid Dbeibah, n’a pas tardé à exprimer ses craintes de voir son pays devenir une arène pour des conflits entre puissances étrangères.
Un tel scénario cauchemardesque enfoncera davantage le clou dans le cercueil des efforts visant à unifier le pays.
Le danger est, donc, bien réel. Ainsi, la seule issue pour prémunir la Libye et les libyens de morcèlement, est de s’unir autour de la table de dialogue afin de former un gouvernement national pour tous les Libyens.
Consciente de danger auquel le pays est exposé suite à la chute de Bachar Al Assad en Syrie, la mission des Nations Unies en Libye a révélé la formation d'un comité technique qui comprend un groupe d'experts libyens, dont la mission serait de déterminer les priorités et les principales étapes pour former un gouvernement consensuel visant à mettre fin à la crise politique que traverse le pays depuis années. Ce processus se concentre sur l’instauration de la stabilité et la prévention de l’escalade, en plus d’unifier les institutions nationales et d’ouvrir la voie à la tenue d’élections et au règlement des différends qui durent depuis des années.
Entretemps, les Libyens attendent avec impatience que ces mouvements contribuent à mettre fin aux périodes de transition en cours depuis le renversement du régime de Mouammar Kadhafi et à trouver une solution aux conflits politiques et armés qui épuisent le pays depuis plus d’une décennie.
Jalel HAMROUNI