Par Myriam BEN SALEM-MISSAOUI
Les incidents survenus dimanche dernier au stade de Radès, lors de la supercoupe de Tunisie, montrent que le niveau de violence dans les stades a pris une tournure grave au point de menacer la paix sociale.
Même s’il s’agit de guerre entre groupes appartenant au même club sportif, les incidents survenus dimanche dernier au stade de Radès lors de la supercoupe de Tunisie exigent un débat et des réponses claires afin d’endiguer ce fléau qui menace aujourd’hui la paix sociale en Tunisie. D’ailleurs, le porte-parole du tribunal de première instance de Ben Arous, Sadok Jouini, a indiqué hier, dans une déclaration à Mosaïque FM, que le parquet a autorisé la prolongation de 48 heures de la garde à vue de plus de 35 jeunes impliqués dans les incidents survenus au stade de Radès, dimanche dernier, lors du match de la supercoupe entre l’Espérance Sportive de Tunis et le Stade Tunisien. Le responsable judiciaire a précisé que le parquet avait ordonné l’ouverture de deux enquêtes judiciaires à l’encontre de ces individus pour constitution d’une association de malfaiteurs en vue d’agresser des biens et des personnes, à la suite d’actes de violence et de vandalisme qui ont éclatés au stade. Le substitut du procureur de la République près le tribunal de première instance de Ben Arous et porte-parole du tribunal a ajouté que les investigations se poursuivent pour identifier les responsables de ces événements. Idem pour le ministère de la Jeunesse et du Sport qui a annoncé une série de mesures, à savoir l’introduction de sanctions complémentaires en coordination avec le ministère de la Justice, interdisant l’accès aux stades aux personnes suspectées ou condamnées pour des actes de violence. L’appel à la Ligue nationale de football professionnel pour appliquer la loi en cas de violations et imposer des sanctions pouvant aller jusqu’à l’interdiction de jouer avec le public (Huis clos) pour les clubs dont les supporters sont responsables des actes de violence et de troubles, l’appel aux médias pour qu’ils deviennent des partenaires dans le maintien de l’ordre social et la sensibilisation des supporters à travers les programmes sportifs, en évitant de diffuser des déclarations incendiaires ou tout contenu susceptible d’aggraver la situation générale et l’appel aux responsables de toutes les structures sportives, de toutes les spécialités, tels que les présidents des fédérations, les clubs, les gestionnaires, ainsi que les entraîneurs et les joueurs, à faire preuve de responsabilité et à éviter de faire des déclarations susceptibles de provoquer des tensions régionales ou de nuire à l’ordre public. En dépit de ces mesures, tous les observateurs sont, par ailleurs, unanimes quant à l’urgence de mettre au point toute une stratégie de nature à endiguer ce fléau. Que faire, de fait, pour lutter efficacement contre cette violence qui menace la paix sociale en Tunisie?
La responsabilité des clubs?
Certaines expériences, notamment en Europe ou en Amérique latine, ont montré que les solutions sécuritaires ne sont pas la bonne réponse pour lutter contre la violence sportive. Alors, les observateurs appellent à lancer un débat national englobant aussi bien les sportifs, les dirigeants, les supporters, les sociologues et les psychologues afin de mettre en place une stratégie globale afin d’endiguer ce fléau. A cet effet, Chiheb Karouida, membre d’un groupe de supporters de l’Etoile Sportive du Sahel, nous a indiqué: «A mon avis, c’est aux clubs de prendre le taureau par les cornes et reconnaître qu’ils sont aussi responsables de cette violence. L’on voit bien en effet que certains dirigeants encouragent cette violence en véhiculant un discours qui nourrit la haine et le mépris d’autrui. Idem pour certains chroniqueurs sportifs qui ont transformé les plateaux en un espace pour régler leurs comptes entre eux ou contre certains clubs. Il est, alors, temps pour les clubs d’assumer leurs responsabilités en mettant en place des actions claires et des formations pour prévenir et répondre aux violences. Les clubs sont encouragés à mettre en œuvre des mesures de prévention telles que des formations sur la prévention des abus et des sensibilisations auprès des différents publics. La sensibilisation et l’éducation doivent occuper donc une place centrale dans les efforts des clubs. Les clubs peuvent organiser des campagnes de prévention régulières pour informer les membres sur les signes précurseurs des violences, les conséquences dévastatrices de ces actes et les ressources disponibles pour les victimes. De plus, des programmes de sensibilisation peuvent être mis en place dans les écoles de sport pour inculquer dès le plus jeune âge les valeurs de respect, d’intégrité et d’égalité». Idem pour la sociologue, Mariem Letaiem, qui estime: «À travers des politiques claires, des programmes de sensibilisation et des mesures de responsabilisation, les clubs doivent travailler ensemble pour créer un environnement sportif sûr, respectueux et inclusif pour tous».
M.B.S.M.