Par Chokri Baccouche
Un accord sur un cessez-le-feu à Gaza est toujours bon à prendre bien sur, mais il faut se garder de verser dans un euphorisme béat, surtout quand on a affaire à un certain Benjamin Netanyahu. C’est que le non-respect des accords est une seconde nature chez le Premier ministre israélien qui a donné la preuve formelle à maintes reprises que les deals et les promesses n’engagent que ceux qui leur prêtent une oreille attentive. D’ailleurs et pas plus tard qu’hier matin, les autorités israéliennes ont accusé le Hamas de provoquer «une crise de dernière minute» en revenant sur certains points de cette trêve qui englobe, la libération d’otages détenus à Gaza, en échange de prisonniers palestiniens, annoncée la veille par les médiateurs qataris, égyptiens et américains. Fidèle à ses louvoiements légendaires, Netanyahu continue à chercher, à l’évidence, la petite bête dans l’espoir de faire capoter ledit accord qu’il a bien du mal à accepter et à digérer. Non sans raison d’ailleurs car l’arrêt de la guerre à Gaza signifie ni plus ni moins que l’arrêt de sa mort politique, pour des raisons connues de tous. Les prétextes fallacieux de Netanyahu ont été d’ailleurs très vite discrédités par le Hamas qui s’est dit attaché au respect de tous les termes de ce pacte.
Après 15 longs mois d’une guerre atroce qui a poussé le seuil de l’horreur à son paroxysme, le Premier ministre israélien est revenu donc à de meilleures intentions, du moins en apparence. Non pas de gaité de cœur mais forcé. Il a été contraint d’accepter ce deal parce que d’une part son armée est à bout de souffle et subit de plus en plus de pertes mais également en raison des pressions croissantes exercées par l’opinion publique israélienne qui multiplie les manifestations afin de l’inciter à mettre un terme à sa cavalcade meurtrière vers l’inconnu. Il semble que Netanyahu ait cédé également aux pressions exercées par le nouveau président américain élu Donald Trump qui avait «promis l’enfer» rappelons-le, si la situation n’était pas résolue avant son retour à la Maison Blanche, prévu le 20 janvier. C’est le message qu’aurait fait passer son envoyé spécial au Moyen-Orient, Steve witkoff. Selon plusieurs sources, ce dernier n’a pas du tout ménagé Netanyahu et c’est justement la raison pour laquelle le Premier ministre israélien a fini par se plier aux exigences du nouveau président américain de peur de perdre son précieux appui à un moment où il en a rudement besoin. La première phase de libération des otages qui va intervenir en principe, dimanche prochain, c’est-à-dire la veille du retour à la Maison Blanche de Donald Trump, est d’ailleurs tout sauf un hasard. Netanyahu qui a pris l’habitude d’envoyer sur les roses, les injonctions de n’importe quel président américain a du ravaler, cette fois-ci, son orgueil démesuré, vraisemblablement par crainte de subir les états d’âme «toxiques» du nouveau chef de l’Exécutif U.S, connu pour ses envolées lyriques et ses réactions imprévisibles surtout quand il se sent vexé ou contrarié.
La trêve aux forceps annoncée, mercredi dernier au soir, suscite à la fois l’espoir mais également la prudence. Malgré sa fragilité, elle constitue un pas positif dans la bonne direction susceptible de mettre un terme, ne serait-ce que momentanément, à un drame kafkaïen qui perdure depuis une année et six mois. Tout au long de cette période, l’humanité a assisté en live à l’un des épisodes les plus tragiques de son histoire, marqué par un génocide sans précédent orchestré et délibérément exécuté par une force occupante contre un peuple qui lutte pour sa survie, sa liberté et son droit à l’existence. Netanyahu qui a tout fait pour rayer ce brave peuple de la surface de la terre a du se rendre à l’évidence que son projet génocidaire est voué à l’échec. Malgré ses effroyables exactions, les Palestiniens sont encore debout, tout comme d’ailleurs le Hamas. L’erreur grossière de Netanyahu est justement d’avoir pensé que pour pérenniser le statu quo et revenir à la situation ayant prévalu avant le déclenchement de l’opération « Déluge d’Al Aqsa » il suffisait d’ « éradiquer » le mouvement de résistance palestinien. Il s’est lourdement trompé car non seulement le Hamas n’est qu’une simple idée mais également et surtout il cristallise les aspirations légitimes de l’ensemble du peuple palestinien. Quelles sont les chances pour que le cessez-le-feu s’installe durablement ? Difficile d’avancer le moindre pronostic à ce sujet. Une chose est sûre cependant : Netanyahu qui a été finalement enclin à satisfaire son ami américain que ses propres alliés extrémistes de son gouvernement se retrouve, du coup, dans une situation très inconfortable. Il sera pris pour ainsi dire entre les feux d’une opinion publique israélienne, de plus en plus hostile à son égard et les tirs croisés de la clique extrémiste et va-t-en guerre de son gouvernement qui ne va certainement pas lui pardonner le modus vivendi passé avec le Hamas. La carrière politique du Néron du Moyen-Orient risquera-t-elle, par conséquent, de négocier sa dernière ligne droite ? Ils sont certainement nombreux les citoyens de par le monde à espérer qu’il en soit ainsi. Par souci de salubrité planétaire et également pour toutes les horreurs perpétrées par ce tyran sanguinaire tout au long de son règne cauchemardesque…
C.B.