Par Hassan GHEDIRI
Le mois de ramadan durant lequel la consommation connaît un pic significatif est un terrain propice aux pratiques commerciales frauduleuses…
Dans le but de maximiser les profits, beaucoup de commerçants n’hésitent pas à manipuler les prix, à vendre des produits périmés, ou encore à recourir à des pratiques trompeuses pour arnaquer leurs clients. Les statistiques du ministère du Commerce témoignent d’une augmentation notable des infractions durant cette période. Les week-ends sont habituellement la période durant laquelle les fréquentations des commerces montent et les ventes progressent. Et quand le début de ramadan coïncide avec une fin de semaine, les tractations commerciales battent des records avec, dans la foulée, un nombre non négligeable de marchands sans scrupule qui s’adonnent à toutes les escroqueries imaginables pour augmenter leurs profits.
Durant le week-end dernier, soit les deux premiers jours de ramadan, nombreux ont été les commerçants ripoux à passer immédiatement à l’acte. C’est en tout cas ce que démontrent les chiffres diffusés par la direction générale des enquêtes et de la concurrence économique. Selon un communiqué rendu public à cet effet, 1287 procès-verbaux auraient été établis par les brigades de contrôleurs économiques déployés au cours des deux premiers jours de ramadan et qui ont pu effectuer un peu plus de 7200 inspections, tous types de commerce confondus. Le ministère constate une hausse de 16% comparée à la même période de ramadan 2024. Cette hausse du nombre des infractions commerciales relevées par les brigades anti-fraude peut être considérée comme un signe de performance du contrôle économique ou bien témoigne-t-elle plutôt une prolifération des pratiques illicites? En 2023, par exemple, les brigades anti-fraude ont constaté une hausse de plus de 30 % des infractions par rapport à la même période de l’année précédente. Parmi les infractions les plus courantes, on retrouve la vente de produits alimentaires non conformes aux normes, la spéculation sur les prix, et la manipulation des dates de péremption. Ces dérives touchent particulièrement les secteurs de l’alimentation de base, des épices, des viandes, ainsi que des produits laitiers.
Limites
Au-delà du mois de Ramadan, les infractions commerciales en Tunisie semblent devenir un mal incurable. Depuis plusieurs années, les brigades anti-fraude, bien qu’ayant intensifié leurs efforts, peinent à endiguer la prolifération de ces pratiques illicites. Les statistiques du ministère du Commerces ne peuvent qu’illustrer l’ampleur du phénomène. Ainsi, en 2022, le ministère du Commerce avait révélé que plus de 40 mille contrôles avaient été effectués durant le mois de Ramadan, se soldant par un peu plus de 15 mille infractions, contre environ 10 mille en 2021.
Les responsables de la répression de la fraude commerciale ne cessent de manifester leur volonté d’agir plus efficacement contre ce fléau, mais ils voient leur engament se heurter au manque de moyens humains et matériels. Le nombre de brigades anti-fraude reste insuffisant face à l’ampleur du travail à accomplir. En Tunisie, le secteur commercial est composé de dizaines de milliers de commerces, de toutes tailles, répartis sur tout le territoire. Ce maillage complexe et souvent informel rend difficile la couverture complète des circuits de distribution.
Le ministère reconnaît également un manque d’équipements, ce qui nuit à la coordination des actions de contrôle. Et en dépit de la révision des lois avec notamment le durcissement des sanctions contre les pratiques commerciales déloyales, les dysfonctionnements logistiques entravent les efforts pour une réduction significative des pratiques frauduleuses.
Pour lutter efficacement contre cette prolifération des pratiques commerciales illicites, il est plus qu’impératif de renforcer les moyens humains et matériels des brigades anti-fraude, en augmentant leur nombre, en fournissant des équipements modernes pour faciliter les contrôles et en investissant dans des formations continues. Le cap devrait également être mis sur l’instauration d’une plus grande rigueur dans l’application des lois contre les contrevenants à même de restaurer la confiance du public dans les circuits commerciaux.
H.G.