« la garde du souverain inspirait la terreur, et plusieurs princes croyant qu’elle venait les arrêter pour les livrer au bourreau… sont piteusement arrêtés… »
Patrick Girard, historien, journaliste et romancier, situe son récit en octobre 912. Son entrée en matière part des rues, à l’accoutumée, sans grande tumulte de Kurtuba (actuelle Cordoue). Il compose sciemment, par la suite, un tableau faisant apparaitre la frayeur des princes qu’il croît par celle, aussi grande, des femmes à qui leurs domestiques et eunuques arrachaient leurs bijoux et ce qu’elles possédaient de précieux. Il adapte, ainsi, un spectacle qui éveille des sentiments d’horreur semblables à celles qui défilent sous nos yeux, en ce XXIème siècle.
L’auteur historien, sait de quoi il parle ! Ce qui attendait ces princes andalous était, certes, moins terrible que les impitoyables bourreaux du cruel souverain Abdallah « qui avait fait exécuter deux de ses fils et nombre de ses demi-frères » ; mais contrariant, malgré tout.
Ils étaient, sournoisement et de force, entrainés au palais royal pour un malencontreux évènement : prêter serment d’allégeance « la bayaa » à celui qui accédait au trône suite au décès de Abdallah. Et, qui n’était autre que celui contre lequel ces princes complotaient en secret pour l’écarter du trône.
Le « walid », Abd al-Rahman III, n’ignorait pas que son règne durant, il ne rencontrerait et n’aurait à faire qu’à de nombreux ennemis. Les foukahas de kurtuba claironnaient, sans s’en cacher, que le jeune souverain n’avait rien de musulman ni d’arabe. En ayant feint l’oublie que Tarak ben Ziad n’était pas arabe non plus.
Il est vrai que la grand-mère du jeune souverain était une princesse captive Vasconne (peuple du pays basque pyrénéen. Sa mère, était, elle aussi, une captive, mais par contre, Franque (tributs d’Européens participant aux croisades).
Le tétanisant Abdallah, qu’était son grand père, avait soustrait à sa mère le petit prince. Il l’isolait loin des yeux de tous, entourage et proches. Seules de rares personnes sélectionnées sur le volet étaient admises à lui rendre visite. Elles étaient menacées s’il leur venait à l’esprit de révéler l’endroit du reclus.
Abdallah, monarque avisé, avait toutefois, initié son petit-fils, dès son jeune âge, aux arcanes du pouvoir, avec minutieuse discrétion.
La vie de reclus a appris à Abd al-Rahman aussi bien, la méfiance que la prudence. Pour cela même, il se passait de confident au point de méconnaitre tout sentiment amical.
Il aimait avoir recours à des conseillers de confessions différentes : musulmans, juifs ou chrétiens s’empressaient pour le servir. Sa prudence l’incitant à n’avoir confiance en personne, il surveillait leurs faits et gestes perpétuellement. C’était ainsi que Abd al-Rahman éradiquait toute possibilité de complot manigancé contre lui
Le monarque entrevoyait les intrigues de son entourage : ceux qui s’entre-déchiraient mus par la soif des honneurs et de l’argent. Il finissait également, de par sa vigilance, par apprendre de ses espions la furie sanglante engagée par des émirs qui s’entre-tuaient en vue de s’emparer de la wilaya de leur voisin. Abd al-Rahman exécrait la médiocrité, celle de ses proches et celle de son entourage.
Mais cette Andalousie du Xème siècle était à son zénith au cours du long règne de Abd al-Rahman (de 912 à 961)
Au sein de cette Andalousie se côtoyaient les différentes religions, il y avait aussi des roitelets chrétiens. Et, les débauches proliféraient.
À la mort du roi Alphonse III, lui succéda à Léon son fils Ordono, impénitent invétéré qui ne dessoule jamais. Il n’avait pas mieux trouvé que de lever une armée « de ramassis, de pillards, de malandrins et de soulards » leur miroitant un riche butin pour remporter une victoire sur les « infidèles circoncis ». Le souverain régnant sur l’Andalousie, n’avait nullement admis cette défaite. Et, en guise de représailles, il avait mené bataille contre Léon, à moultes reprises.
Abd al-Rahman et les figures qui l’accompagnent sont révélés, par Patrick Girard, l’historien, fidèlement à leur vécu à leurs diverses réalités, ressuscitant la nostalgie d’une Andalousie perdue. Le tout apparait romancé ; mais cette œuvre soigneusement référenciée constitue un réel document historique pour les amoureux de l’histoire.
A.A.S